Les fusions de communes en Gironde

Depuis le début du XIXᵉ siècle, la carte administrative de la Gironde n’a cessé d’évoluer. Derrière les noms familiers de nos communes actuelles se cachent souvent des histoires de regroupements, de disparitions ou de renaissances territoriales. Cet article vous propose de remonter le fil du temps pour mieux comprendre comment et pourquoi certaines communes girondines ont fusionné au fil des décennies.

Au-delà de la simple évolution géographique, ces transformations traduisent des enjeux plus larges : mutualisation des services, réponse à la désertification rurale, modernisation des structures locales, mais aussi parfois volonté politique de préserver un nom ou une identité commune. Chaque fusion porte la mémoire de décisions humaines, souvent pragmatiques, parfois sensibles.

En retraçant plus de deux siècles de modifications administratives – des petites absorptions du XIXᵉ siècle aux communes nouvelles créées depuis 2015 – nous vous proposons une lecture claire et chronologique des principaux changements qui ont redessiné les contours de la Gironde. Vous y découvrirez des cas emblématiques comme la naissance de Belin-Béliet ou la création plus récente de Margaux-Cantenac, mais aussi des fusions moins connues, parfois oubliées.

Pensé comme une ressource à la fois documentée, lisible et utile, cet article intéressera autant les généalogistes, les curieux de l’histoire locale, que les professionnels de l’urbanisme, du droit ou de l’administration publique.

🔹 XIXe siècle

Le XIX siècle marque une période charnière pour l’organisation territoriale de la Gironde. Dans un contexte post-révolutionnaire, l’administration française cherche à stabiliser et rationaliser les structures locales héritées de l’Ancien Régime. C’est à cette époque que de nombreuses petites communes, parfois issues de paroisses ou de hameaux, sont absorbées par des voisines plus importantes.

Ces regroupements obéissent à des logiques à la fois économiques, géographiques et administratives. Il s’agit de mieux gérer les ressources, de centraliser les services publics, mais aussi d’adapter la carte communale à l’évolution démographique. Certaines communes, devenues trop petites ou isolées, ne peuvent plus subvenir seules aux besoins de leurs habitants.

Parmi les fusions les plus significatives de cette époque, on peut citer l’intégration de Monbadon à Puisseguin en 1818, la disparition de Parsac au profit de Montagne en 1830, ou encore l’absorption de Saint-Lambert par Pauillac en 1873. Ces mutations sont souvent peu documentées, mais elles constituent les premières pierres d’un mouvement de restructuration du territoire girondin qui se poursuivra au fil des siècles.

Date Nouvelle commune Communes fusionnées ou supprimées
1806 Targon Targon + Sainte-Croix
1806 Saint-Savin Saint-Savin + Le Martignac
1818 Puisseguin Intègre Monbadon
1820 Frontenac Intègre Sallebruneau
1827 Pugnac Intègre Lafosse
1830 Montagne Absorbe Parsac
1831 Saint-André-du-Bois Intègre Le Puy
1833 Saint-Genès-de-Lombaud Intègre Les Roques
1834 Saint-Macaire Fusion avec Le Garde
1846 Saint-Félix-de-Foncaude Intègre Saint-Félix
1853 Vérac Fusion avec Le Pian
1867 Blanquefort Fusion avec Le Bourg
1873 Pauillac Absorbe Saint-Lambert
1877 Mongauzy Intègre Les Grands-Meslans

🔹 XIXe siècle

Le XXᵉ siècle constitue une nouvelle phase d’évolution territoriale pour la Gironde, marquée cette fois par des réorganisations plus ciblées. Si les grandes vagues de fusions du XIXᵉ siècle avaient des motifs essentiellement administratifs et démographiques, celles du XXᵉ siècle répondent davantage à une logique de structuration régionale, d’aménagement du territoire et de gestion rationnelle des ressources locales.

C’est au cours de cette période que certaines communes rurales se regroupent pour faire face à la modernisation des infrastructures, à l’urbanisation croissante ou encore à l’émergence de nouveaux pôles d’activité. Ces ajustements visent souvent à renforcer les capacités économiques et administratives des communes fusionnées, tout en conservant une partie de leur identité locale.

On observe ainsi des fusions emblématiques comme celle de Belin et Béliet en 1967, ou encore la réorganisation de Saint-Savin en 1965. Ces décisions, parfois initiées par les communes elles-mêmes, sont généralement accompagnées d’un arrêté préfectoral fixant les modalités de la fusion.

Ces transformations restent aujourd’hui des références importantes dans l’histoire administrative de la Gironde, témoins d’une époque où la coopération intercommunale commençait à prendre une place prépondérante dans la gestion des territoires.

Date Nouvelle commune Communes fusionnées ou supprimées
1965 Le Taillan-Médoc Le Taillan-Médoc Le Taillan + Le Grand-Médoc
1965 Saint-Savin (réorganisation) Fusion complète du territoire ancien
1967 Belin-Béliet Belin + Béliet
1968 Saint-Avit-Saint-Nazaire Saint-Avit + Saint-Nazaire
1971 Saint-Romain-la-Virvée Saint-Romain + La Virvée
1973 Le Pian-sur-Garonne Le Pian + Le Tasta
1974 Belin-Béliet (confirmée par arrêté) Arrêté préfectoral du 7 août 1974

🔹 XXIe siècle (communes nouvelles)

Le XXIᵉ siècle s’inscrit dans une dynamique de réorganisation territoriale profonde, portée par les réformes successives de l’État visant à renforcer la cohérence administrative et à encourager la coopération intercommunale. Ce mouvement donne naissance à ce que l’on appelle les communes nouvelles, un dispositif législatif mis en place dès 2010 pour faciliter les fusions volontaires.

En Gironde, plusieurs petites communes rurales choisissent ainsi de s’unir afin de mutualiser leurs moyens, améliorer la gestion des services publics locaux, et gagner en visibilité politique et institutionnelle. L’objectif est aussi de répondre aux enjeux contemporains : baisse démographique dans certaines zones, besoin d’équipements structurants, ou encore simplification de l’action publique.

Des exemples notables jalonnent cette période : la création de Val-de-Virvée en 2016, la fusion de Margaux et Cantenac en 2017, ou encore la formation plus progressive de Porte-de-Benauge, finalisée en 2024. Ces transformations, bien qu’encore récentes, témoignent d’une volonté politique renouvelée de penser le territoire de manière plus intégrée, tout en respectant les identités locales héritées.

Date Nouvelle commune Communes fusionnées ou supprimées
2016 Val-de-Virvée Aubie-et-Espessas + Saint-Antoine + Salignac
2017 Castets et Castillon Castets-en-Dorthe + Castillon-de-Castets
2017 Margaux-Cantenac Margaux + Cantenac
2019 Blaignan-Prignac Blaignan + Prignac-en-Médoc
2019 Val-de-Livenne Marcillac + Saint-Caprais-de-Blaye
2019–2024 Porte-de-Benauge Arbis + Cantois + Saint-Genis-du-Bois

🔹 En résumé

L’histoire des fusions de communes en Gironde révèle bien plus qu’un simple ajustement administratif : elle illustre la manière dont un territoire évolue, s’adapte et se réinvente au gré des besoins de ses habitants et des mutations sociétales. De l’époque post-révolutionnaire aux dynamiques contemporaines, chaque fusion témoigne d’un équilibre recherché entre efficacité de gestion, solidarité locale et préservation des identités territoriales.

Comprendre ces évolutions, c’est aussi mieux appréhender la géographie actuelle du département, ainsi que les enjeux auxquels sont confrontées les collectivités aujourd’hui. Pour les chercheurs, généalogistes, élus ou habitants curieux de leur histoire locale, ces fusions racontent une mémoire collective qui mérite d’être conservée et partagée.